Dato: 26. april 1843
Fra: Alfred de Vigny   Til: H.C. Andersen
Sprog: fransk.

Les forets-vierges.

Fragment.

Solitudes que Dieu fit pour le Nouveau-monde, Forets, vierges encor, dont la route profonde a d'éternelles nuits que les brulans soleils n'éclairent qu'en tremblant par deux rayons vermeils, (car le couchant peut seul et seule peut l'aurore glisser obliquement aux pieds du sycomore), pour qui dans l'abandon soupirent vos cyprès? pour qui sont épaissis ces joncs luisants et frais? quels pas attendez-vous pour fouler vos prairies? de-quels peuples éteints étiez-vous les patries? Les pieds de vos grands pins si jeunes et si forts sont-ils entrelacés sur la tête des morts? et vos gémissemens sortent-ils de ces urnes que trouve l'Indien sous ces pas taciturnes? et les bruits du désert dans la plaine entendus? est-ce un soupir dernier des royaumes perdus?Votre nuit est bien sombre et le vent seul murmure.

Une peur inconnue accable la nature. Les oiseaux sont cachés dans le creux des pins noirs et tous les animaux ferment leurs reposoirs sous l'écorce, ou la mousse, ou parmi les racines ou dans le creux profond des vieux troncs en ruines. L'orage sonne au loin, le bois va se courber de larges gouttes d'eau commencent à tomber; Le combat se prépare et l'immense ravage entre la nue ardente et la forêt sauvage.

- Qui donc cherche sa route en ces bois ténébreux? une pauvre Indienne au visage fiévreux pâle et portant au sein un faible enfant qui pleure; sur un sapin tombé, pont tremblant qu'elle effleure elle passe, et sa main tient sur l'épaule un poids qu'elle baise; autre enfant pendu comme un carquois.

26. avril

1843. Mercredi Paris.

Alfred de Vigny

Fragment de: La Sauvage

Poëme philosophique.

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